La Civic Type R est-elle à la hauteur de son physique de sportive avec le couteau entre les dents ? Quelques kilomètres suffisent à dévoiler le vrai visage de cette voiture qui a d’abord été conçue sur circuit, avant d’avoir été une voiture de série. Et cela en dit long sur son identité.
Vous ne le savez peut-être pas, mais la Civic Type R FK8 est particulière : le modèle de série découle directement du modèle développé pour le championnat de Touring, et pas l’inverse. Un cas inédit, qui prouve le pedigree d’une voiture sans concession. Mais puisque notre rubrique s’intitule « Daily Driver », nous avons tenté de vérifier si cette Civic était utilisable au quotidien, dans le cadre d’un usage de véhicule unique « à tout faire » du foyer.
Intérieur
A quoi s’attendre à bord de la Honda Civic Type R ? On fait le tour du propriétaire. La Honda Civic Type R a été conçue dès le départ comme une voiture de course. Mais cela retire-t-il forcément toute capacité d’accueil et de « cocooning » à la Civic Type R ? Vous risquez d’être surpris par l’espace à bord et la qualité de l’assise…
Siège, position de conduite
La sellerie est à deux visages dans la Civic Type R. Une banquette arrière plutôt classique, en tissu, relativement confortable et accueillante, qui propose de l’espace pour deux adultes avec une garde aux genoux et à la tête plus qu’acceptable. Et puis il y a ces superbes sièges avant baquets en une seule pièce, marqués par la présence de meurtrières qui servent normalement à faire passer des harnais. Mais ici, point de harnais six points, la ceinture (rouge, s’il vous plaît), est tout ce qu’il y a de plus classique.
L’assise est confortable et moelleuse (elle tranche totalement avec la dureté extrême de l’amortissement, nous y reviendrons), et les réglages corrects, mais manuels. Honda a voulu limiter le poids de l’auto sous les 1400 kg, et pour y parvenir, il a bien fallu faire des concessions en matière de confort. Oubliez donc le réglage électrique des sièges (il n’existe pas, même en option). Plus regrettable : le réglage lombaire n’existe pas, et sur les longs trajets, son absence se fait remarquer, notamment pour les grands gabarits. Le soutien des vertèbres lombaires aurait été un vrai plus.
La position de conduite est idéale puisque les amplitudes de réglages sont nombreuses, y compris avec le volant et son déplacement en profondeur. Ces sièges baquets ne sont pas là que pour faire joli puisqu’ils maintiennent admirablement bien en courbe. Bref, tous les gabarits sauront trouver leur place à bord de cette Civic qui se montré étonnamment accueillante pour les passagers arrière.
Le petit regret vient de l’absence des « Magic Seats » de Honda à l’arrière. Pour rappel, il s’agit d’une banquette modulable spécifique à Honda et extrêmement pratique (il est possible de rabattre d’un coup le dossier, mais aussi l’assise). Ici, les sièges sont classiques et simplement rabattables (2/3-1/3). Ils forment un fond presque plat avec le coffre. Les fixations Isofix sont de la partie, même si Bébé pourrait hériter d’une hernie discale précoce à cause de la raideur des suspensions arrière.
Technologie
La Honda Civic Type R n’est pas une voiture souvent citée pour son contenu technologique, mais là n’est pas l’intérêt de l’auto. Pourtant, elle propose des choses intéressantes et surtout le plus important : recharge de smartphone par induction, navigation, Android Auto/Apple CarPlay, prise USB et HDMI ou encore les différents modes de conduite.
La dotation de série est particulièrement généreuse. Elle comprend la climatisation automatique bizone, l’écran multimédia tactile, la navigation, l’instrumentation numérique (paramétrable), les pleins phares automatiques ou encore le système audio à douze enceintes qui paraît presque un peu superflu dans une voiture aussi radicale, et à l’insonorisation phonique très légère !
Aides à la conduite
- CMBS : prévention des collisions, l’alerte anti-collision frontale
- FCW (Frontal Collision Warning) : alerte de franchissement de ligne
- LDW (Lane Departure Warning) avertissement de sortie de voie
- LKAS : aide au maintien dans la voie
- Régulateur de vitesse adaptatif
- Reconnaissance des panneaux de signalisation
Ecran tactile
L’écran de 7 pouces est plutôt réactif, mais Honda a clairement du retard en matière d’environnement logiciel. Les menus sont un peu fouillis et les réglages parfois curieux. Le design des applications et des widgets est trop simpliste et fait un peu archaïque. Heureusement, le principal y est, et il est possible de régler le retour de sensibilité du tactile (mettez-le à fond, ça sera mieux) sur cet écran qui aurait pu être un peu plus travaillé. Son emplacement, relativement haut, est en revanche facilement accessible.
Une chose à noter, toutefois : nous n’avons pas trouvé comment activer automatiquement le frein à main électrique à chaque arrêt du véhicule. Il faut systématiquement appuyer sur le bouton « Brake hold » à côté du levier de vitesse après chaque démarrage. Mais si vous l’oubliez, attention au stationnement en pente : le frein à main ne se met pas tout seul à la coupure moteur ! (c’est du vécu). Frustrant, donc, mais si vous nous lisez et que vous savez comment l’activer définitivement et automatiquement, nous sommes preneur, et nous mettrons à jour…
Coffre
Pour une voiture de 4,55 mètres, la Civic Type R est particulièrement accueillante. Et à l’ouverture du coffre (manuelle, le hayon électrique n’existant pas), on se dit que l’on partirait bien en vacances avec l’auto. Chose que l’on a faite ! Nous pouvons du coup vous faire un retour sur ces 420 litres qui sont généreux, et, surtout, l’ouverture du coffre offre une grande amplitude qui laisse un accès très large et haut au coffre. Le volume de coffre s’explique aussi, en partie, par le fait que le réservoir est situé sous la banquette arrière (pour des question de répartition de poids entre essieux).
Comme souvent sur d’autres autos sportives, le seuil de coffre est trop élevé et gène pour le chargement d’objets très lourds, mais pour le reste, cette Civic est un compagnon vraie surprise du quotidien. Il faudrait vraiment avoir une famille nombreuse pour ne pouvoir dire que la Civic est un couteau suisse. La longueur de chargement, banquette arrière rabattue, est également importante et permet sans problème d’aller chiner un meuble ou un objet très encombrant. Bon point, donc, pour la japonaise.
Rangements
Pas de grande surprise de ce côté là, la Civic Type R offre des rangements aux emplacements habituels : vide-poche, portières (avant et arrière), et boîte à gants plutôt spacieuse. L’accoudoir central cache aussi un rangement supplémentaire avec porte-gobelets. A l’arrière, les rangements dans les portes sont minuscules. Pour conclure, on aurait pu pinailler : la présence d’aérateurs pour les passagers arrière (au niveau de l’arrière de l’accoudoir) aurait été bienvenue. Mais c’est de l’ordre du détail.
Conduite
Moteur/Boîte
Le quatre cylindres 2.0 VTEC turbo développe 320 ch à 6500 tr/mn et 400 Nm entre 2500 et 4500 tr/mn. Un couple franchement généreux et disponible sur une belle plage, qui montre l’élasticité de la mécanique. Et il faut le dire, c’est très appréciable au quotidien puisque les relances et la souplesse n’obligent pas le conducteur à rétrograder sans cesse. Sur autoroute, l’auto s’est montrée très à l’aise, mais l’isolation phonique quasiment inexistante (on entend le moindre gravier dans les passages de roue) fait que le bruit est trop présent à 130 km/h. Sur de longs trajets, l’ambiance sonore peut devenir fatigante.
Les montées en régime de ce K20C1 sont franches et plutôt linéaires, même si l’on note un petit coup de pied aux fesses autour des 5000 tr/mn. La mécanique est rageuse, mais pour réellement profiter des performances (sur circuit), il faut rester dans les hauts régimes et jouer du levier de vitesse. En gros : piloter ! Et puisque l’on parle de boîte…
La transmission est uniquement manuelle sur la Civic, avec un pommeau en aluminium qui doit être manié d’une main de fer. Le guidage est parfait, les verrouillages assez francs et, globalement, cette boîte offre un usage ferme et un feeling très « mécanique ». A des années lumières des guidage artificiels, trop doux, et flous de bon nombre de sportives. Sur notre exemplaire, le verrouillage de la 4e accrochait légèrement (l’auto était un véhicule de presse, et après 6000 km à être martyrisée…).
Le seul reproche que nous lui ferions serait le rétrogradage 6/4, qui n’est pas forcément évident à réaliser à la volée et facilement. Il nous est arrivé d’aller un poil trop loin et de commencer à entrer la 2. Et avec le système « Rev Matching » (le moteur met un coup de gaz au rétrogradage pour simuler un talon-pointe, évitant ainsi les à coups, comme sur une Nissan 370Z Nismo), imaginez un peu la montée en régime entre 6e et 2e ! L’embrayage, lui, est un modèle du genre : progressif, juste ce qu’il faut, mordant, facile à doser… Bref, l’accord moteur/boîte est sur une autre planète vis-à-vis de la concurrence, qui, de toute façon, se met presque unanimement à la transmission automatique.
Terminons ce chapitre sur la présence d’un différentiel autobloquant de type Torsen sur le train avant. Sur le sec, il fait un travail fantastique et son calibrage est irréprochable, mais les pertes de motricité sont bien plus importantes sur sol mouillé et/ou froid. Nous avons eu pas mal de pluie durant notre période de test, et les généreuses gommes en 245 n’arrivaient pas toujours à coller en cas de coup de gaz trop généreux avec les roues braquées. Dans des conditions climatiques pas idéales, il convient donc de doser un peu plus les accélérations en sortie de courbe.
Direction, suspensions, freinage
Première chose : la direction est FAN-TAS-TIQUE ! Et pourtant, c’est une assistance électrique qui aurait pu faire craindre un rendu artificiel. Il n’en est rien : les trois modes de conduite jouent sur la dureté de la direction, mais dans les trois cas, c’est un régal. En confort, elle est presque un peu trop « légère » par rapport aux deux autres modes. Mais en mode « R+ », la précision et la consistance sont tout simplement diaboliques. Tellement en fait, que lorsque l’on repasse au volant d’un véhicule « traditionnel », on a l’impression d’avoir une direction assistée de Fiat Punto avec le mode ultra assisté « City » !
La Civic Type R a connu une évolution par rapport à ses aînées, avec la présence de suspensions multibras à l’arrière, qui amènent clairement de la stabilité à la caisse. A l’avant, c’est toujours le double pivot découplé avec amortissement de type McPherson.
Les suspensions nous ont posé un peu plus de problèmes que le reste de l’auto. Non pas qu’elles ne soient pas en accord avec le caractère de l’auto, mais… elles sont peut-être un peu TROP en accord avec l’ambiance course. En mode confort, elles sont déjà dures. Très dures. A tel point que le passage en mode « Sport », puis « R+ », font craindre le pire pour les passagers. C’est simple : le mode « R+ » est inutilisable au quotidien. Le moindre gravier sera retranscrit, la moindre bosse, et si, de nuit, vous roulez dans un nid-de-poule que vous auriez raté : votre kinésithérapeute vous attendra à bras ouverts.
En fait, le mode « R+ » est parfait sur circuit et sur bitume très lisse. Mais en réalité, le meilleur mode est le mode confort. Le gros problème, sur cette Civic Type R, est qu’il n’est pas possible de paramétrer un mode « perso », comme c’est le cas chez d’autres constructeurs. Nous aurions bien aimé associer la direction du mode « R+ » à l’amortissement du mode « Confort ». Dommage…
Les freins avant sont de généreux disques ventilés (non flottants) de 350 mm logés dans des étriers Brembo. Ils sont refroidis par un système d’écoulement d’air qui part du bouclier avant et qui ressort derrière les roues avant (ici, les ouïes ne sont pas factices, elles servent à quelque chose !). A l’arrière, les disques sont de 305 mm.
Le freinage est excellent et n’a montré aucun signe de faiblesse sur notre période d’essai, y compris en descente de col. Le seul souci est l’attaque de la pédale de frein. Explications : l’axe de la pédale ressort au dessus de cette dernière, ce qui fait que les « Berthe aux grands pieds » auront la pointe du pied qui vient appuyer à cheval entre la pédale et l’axe, au dessus. Un feeling un peu curieux et pas franchement agréable.
La Honda Civic Type R profite d’un poids relativement « mesuré » (1380 kg) pour contenir sa consommation. Les pneumatiques sont en revanche assez onéreux.
Malgré toute la technologie du monde, on aura beau faire : un 2.0 turbo de plus de 300 ch, ça se nourrit. Mais étonnamment, à allure stabilisée, la Civic Type R n’est pas si gourmande que cela. Le plus gros poste de dépense proviendra des pneus et des freins si le propriétaire amène sa Civic là où elle a été conçue (sur piste). Au delà de ça, la mécanique est réputée plutôt fiable.
Rappel : nous n’effectuons pas de calcul du PRK (prix de revient kilométrique) comme le font certains de nos confrères pour une raison toute simple : il se base sur des variables trop changeantes/incertaines, comme le financement (crédit, LOA…), la décote, l’assurance (qui dépend évidemment du profil du propriétaire) ou encore le prix d’achat (qui varie fortement en fonction des remises). Contrairement à des professionnels comme l’Argus, nous nous concentrons donc sur des critères simples et peu ou pas fluctuants : planning d’entretien, prix des pneus, coût en carburant, malus, achat (sur prix catalogue).
Carburant
On le rappelle, il s’agit d’un usage « daily ». Nous avons donc conduit la Civic Type R comme n’importe quelle autre auto, même si, évidemment, nous nous sommes fait plaisir dès que les conditions le permettaient. La climatisation et la radio étaient toujours activées.
Plein n°1
- 19,97 litres, 230 km
- 90 % route (départementale, nationale), 10 % ville
- Consommation réelle :8,68 l/100 km
- Consommation ordinateur de bord : 8,3 l/100 km
Plein n°2
- 21,95 litres, 271 km
- 90 % autoroute, 10 % ville
- Consommation réelle : 8,1 l/100 km
- Consommation ordinateur de bord : 7,9 l/100 km
Plein n°3
- 32,85 litres, 362 km
- 50 % autoroute, 50 % départementale
- Consommation réelle : 9,07 l/100 km
- Consommation ordinateur de bord : 8,5 l/100 km
On le voit sur ces données, lorsque l’on évite les villes, la consommation moyenne tombe à des niveaux très acceptables. Par contre, en ville (Annecy, Lyon…), nous avons enregistré une consommation moyenne entre 12 et 14 l/100 km. Logique.
Pneumatiques
Les jantes de 20 pouces sont chaussées en 245/30R. D’origine, la Civic est montée en Contisport 6 (prix moyen : 200 € le pneu). La fourchette de prix est large, mais comptez environ 450 à 500 € pour un train de pneus en Michelin P4S. Il est possible de descendre à moitié moins pour un train de type Falken, mais il est aussi envisageable de quasiment doubler ce prix en cas d’achat de gommes asymétriques typées « piste », chez Pirelli, notamment. Bref, les pneus seront un poste de dépense non négligeables, d’autant plus en gomme tendre avec une usure prononcée à l’avant, vu le couple généreux délivré par le 2.0 turbo.
Budget
- Puissance fiscale : 21 CV
- Prix moyen carte grise : 950 €
- Rejets CO2 : 169 g/km (NEDC), 193 g/km (WLTP)
- Malus : 4673 € (2019), 10488 € (2020, NEDC Corrélé), 8671 € (au 1er mars 2020, WLTP)
- Prix véhicule (catalogue) : 42310 €
- Prix moyen pneu (selon gamme et marque) : entre 130 et 300 €
- Prix disque avant : 185 €
- Prix disque arrière : 63 €
- Prix plaquettes avant : 196 €
- Prix plaquettes arrière : 66 €
Entretien
Les révisions sont à faire tous les 20 000 km ou tous les ans. La distribution est à entraînement par chaîne, son contrôle doit donc être fait à partir d’un fort kilométrage (au delà de 200 000 km), comme sur n’importe quelle auto. Pour le reste, c’est du grand classique, avec changement des bougies tous les 120 000 km (sauf si « plus de 50 % de temps de conduite à plus de 200 km/h (124,3 mph) », dans ce cas, remplacer les bougies d’allumage tous les 60 000 km). Le filtre à carburant se fait aussi tous les 120 000 km (ou six ans), tout comme le réglage du jeu des soupapes. Le liquide de refroidissement, enfin, se vidange tous les 200 000 km ou 10 ans, et le liquide de frein est préconisé tous les 3 ans.
Ces données sont à titre indicatif puisque la Civic Type R dispose d’un ordinateur de bord qui contrôle l’état de la mécanique et envoie des messages en temps réel lorsqu’il y a besoin d’une maintenance. Les révisions et passages en ateliers ne sont donc pas nécessairement toujours à faire tous les ans ou 20 000 km, mais ils peuvent malgré tout être calibrés sur ce programme là par Honda.
Les freins, pour finir, se montrent plutôt économiques pour une telle auto : moins de 400 € la paire pour l’avant, et moins de 400 € pour le jeu de plaquettes avant.
Bilan de la Honda Civic Type R (FK8)
Finalement, cette Civic amène tout un questionnement : peut-on réellement avoir une voiture taillée pour la piste, mais utilisable au quotidien ? Souvent, la réponse est « oui, mais ». Et c’est le cas aussi ici, avec un amortissement particulièrement sec qui ne plaira pas aux passagers, avant comme arrière. C’est dommage, car la Civic est tellement habitable qu’elle peut vite vous faire oublier vos idées délirantes de SUV. Mais encore faudra-t-il assumer le bruit, le look et les séances d’ostéopathe.