Nous vivons à une époque où avoir une voiture capable de rouler à 400 km/h ne fait plus ni chaud ni froid. Bugatti, Hennessey, McLaren… Tous ces constructeurs se livrent une bataille sans merci pour produire les voitures les plus rapides, les plus extravagantes, les plus exclusives. Et puis il y a Koenigsegg, petite marque Suédoise à échelle humaine, qui compte à peu près autant d’employés qu’un hôtel de 150 chambres, mais qui produit des voitures parmi les plus enthousiasmantes, et ce depuis plus de vingt ans.
On peut comprendre que certaines personnes n’aient jamais entendu parler de la marque Koenigsegg. En effet, vous avez certainement plus de chances de gagner trois fois de suite le jackpot à l’Euromillions que de croiser une seule Koenigsegg dans toute votre vie, tant ces voitures sont rares. Même à Monaco, Miami ou Dubaï, ces autos ne courent pas les rues, puisque leurs acheteurs les gardent au chaud dans leurs garages. Mais l’histoire de cette marque vaut vraiment le coup d’être connue.
Tout commence en 1994, alors qu’un jeune homme décide de concrétiser son rêve de proposer au monde les supercars ultimes. Christan Von Koenigsegg, alors âgé de 22 ans seulement, fonde la marque Koenigsegg Automotive. Pendant deux ans, personne n’entend parler de lui, jusqu’en 1996, lorsqu’un étrange prototype s’invite pendant un évènement automobile. Sous les yeux du public, plusieurs personnes ont le privilège de conduire cette auto sur le circuit, et au bout du compte, ils sont tous époustouflés par ses performances et son design. Un an plus tard, Christian Von Koenigsegg présente ce même prototype, baptisé « CC », au Festival du film de Cannes. Un choix vraiment très judicieux, puisque la couverture médiatique du festival, ainsi que les réactions du public, vont permettre à la marque d’aller plus loin, jusqu’à la production du premier modèle de série.
La première Koenigsegg s’affiche officiellement lors du Mondial de l’auto de Paris en 2000. Répondant au nom de « CC8S » ( CC V8 Supercharged ), cet unique modèle servira par la suite de voiture test afin de permettre au constructeur d’homologuer ses voitures pour les commercialiser. L’auto est d’ailleurs déjà équipée du moteur de 655 chevaux que l’on retrouvera sur la version de série. Il faudra attendre 2002 pour que la première CC8S soit enfin produite. Elle sera livrée à son propriétaire en 2003, au Salon de Genève. Au total, seulement six exemplaires seront produits, faisant de la CC8S l’une des Koenigsegg les plus rares jamais produites par la marque. Et ça ne s’arrête pas là ! C’est avec cette voiture que la marque décroche son premier record, et plus particulièrement avec son moteur, qui était le moteur de série le plus puissant au monde à l’époque.
La marque continue son petit bout de chemin, et lance en 2004 la CCR. Basée sur la CC8S, elle s’en distingue par un kit carrosserie plus musclé, mais également des freins plus gros, un châssis complètement revu ainsi qu’un moteur gonflé pour atteindre 806 chevaux ! En gros, c’est la même, sans être la même, mais en mieux ! Cette CCR sera d’ailleurs couronnée du record de la voiture de série la plus puissante au monde, ce qui fait déjà deux records en deux ans ! Pas mal, surtout pour un constructeur qui souffle seulement sa dixième bougie. Entre 2004 et 2006, 14 exemplaires de CCR seront produits. En 2005, cette même auto offrira à Koenigsegg un troisième record, en devenant la voiture la plus rapide du monde, en détrônant la McLaren F1 et ses 386,4 km/h. Sur le circuit de Nardo en Italie, la CCR atteint la vitesse de 387,86 km/h, une folie pour l’époque, encore plus dingue pour une marque aussi jeune.
En 2006, la marque présente la CCX, premier modèle permettant à Koenigsegg de franchir l’Atlantique et de vendre ses jouets aux Etats-Unis. La même année, la marque prouve une nouvelle fois sa suprématie. La CCX passe dans l’émission Top Gear UK, et devient la voiture la plus rapide sur leur circuit. Rien de bien surprenant là-dedans me direz-vous, mais il y a une subtilité : la CCX restera tout en haut de leur classement pendant sept années !
La guerre de la vitesse est déclarée, et vont s’ensuivre des répliques quasi coup sur coup de la part de Bugatti et Hennessey. En 2008, la CCX établit le record du 0-300-0 km/h en 29,2 secondes, alors que le 0 à 200 km/h est abattu en 9,3 secondes. Des performances juste stratosphériques, qui ne font qu’annoncer le futur de la marque, qui commence à se faire connaître du grand public. Les modèles se suivent, tous plus fous les uns que les autres, repoussant continuellement les limites, forçant les autres marques à répliquer pour ne pas se faire distancer dans la course à la vitesse.
En 2010, l’Agera fait son arrivée dans la gamme, puis sera déclinée en version R en 2011. C’est cette Agera R qui élèvera Koenigsegg au rang de constructeur d’hypercars. Popularisée dans le film Need For Speed sorti en 2014, elle est équipée d’un moteur FlexFuel. Quand on lui donne à boire du sans plomb 95, elle ne développe « que » 960 chevaux. Mais quand on y met du E85, son moteur développe la puissance complètement ahurissante de 1140 chevaux, assez pour faire tomber le record du 0-300-0 km/h en un tout petit peu plus de 21 secondes. Et un record de plus dans la besace, mais quand s’arrêteront-ils ?
En 2014, Koenigsegg frappe un grand coup et présente la One:1 . Si l’appellation est quelque peu étrange pour une voiture, elle prend tout son sens lorsqu’on la décortique. Il s’agit ni plus ni moins que du rapport poids / puissance de l’auto, égal à 1 pile poil : une première dans le monde de l’automobile. Ce modèle, pesant 1360 kg développe donc 1360 chevaux, un ratio qui doit permettre de bien s’amuser sur circuit ! La production de cette Koenigsegg One:1 sera limitée à six exemplaires.
En 2015, la marque Suédoise prend le virage écologique et présente la Regera, première voiture hybride du constructeur. Equipée du V8 biturbo maison, elle dispose également de trois moteurs électriques portant la puissance totale de l’engin à 1500 chevaux, le tout sans boîte de vitesse ! Koenigsegg lance en 2019 la Jesko, nommée ainsi en hommage au père de Christian Von Koenigsegg, Jesko Von Koenigsegg. Enfin, la Gemera fait son arrivée, première voiture dotée de quatre places. Qualifiée de mégacar par la marque, elle ne sera produite qu’à 300 unités, et devrait pouvoir atomiser le 0 à 100 km/h en 1,9 secondes.
Le parcours de Koenigsegg est fascinant. En 26 ans, la marque a réussi à s’imposer comme l’une des trois ou quatre plus exclusives au monde, en produisant des engins dont les performances dépassent de très loin l’entendement. Le tout avec une équipe qui ne doit pas compter plus de 200 salariés au total, et en produisant la majeure partie de ses voitures à la main. Tout ça justifie le prix de ces autos d’exception, qui ne descend jamais en dessous du million d’Euros. En résumé, Koenigsegg est l’incarnation du rêve d’un homme, qui a eu le courage de se lancer il y a 26 ans, et qui n’a pas fini de faire parler de ses voitures. La prochaine étape est la barre des 500 km/h, et aucun doute qu’elle sera bientôt franchie.