La question du contrôle médical obligatoire pour le permis de conduire fait régulièrement débat, notamment dans un contexte de vieillissement de la population et d’augmentation des pathologies chroniques. Si certains pays comme l’Italie ou les Pays-Bas ont déjà mis en place des examens médicaux réguliers, la France reste relativement souple sur ce point. Pourtant, au nom de la sécurité routière, cette mesure mérite d’être sérieusement envisagée.
Un contrôle déjà en place… mais limité
En France, un contrôle médical est déjà exigé dans certaines situations, notamment pour les conducteurs professionnels (permis poids lourds, transports de personnes) ou en cas d’infraction grave liée à la santé (alcool, drogue, perte de connaissance au volant, etc.). De même, les personnes atteintes de certaines pathologies doivent parfois passer une visite médicale auprès d’un médecin agrée à la préfecture de Metz par exemple.
Mais pour le permis de conduire classique (permis B), détenu par la majorité des automobilistes, aucun suivi médical régulier n’est requis, quel que soit l’âge du conducteur ou l’évolution de son état de santé. Cela pose la question : un conducteur de 85 ans souffrant de troubles cognitifs peut-il continuer à conduire sans qu’aucun professionnel de santé ne vienne vérifier ses capacités ?
Des enjeux de santé publique et de sécurité
La conduite d’un véhicule motorisé exige des capacités physiques, sensorielles et cognitives minimales. Une baisse de la vue, de l’ouïe, des réflexes, ou des fonctions exécutives (concentration, anticipation, jugement) peut transformer un automobiliste en dangereux danger public, sans même qu’il en ait conscience.
Selon la Sécurité routière, les seniors ne sont pas plus impliqués que les jeunes dans les accidents mortels en nombre absolu. Toutefois, lorsqu’ils sont impliqués, leur taux de responsabilité est souvent plus élevé, notamment à cause d’erreurs d’appréciation ou de lenteur de réaction.
Mais au-delà de l’âge, ce sont aussi des maladies comme l’épilepsie, le diabète, les AVC ou certaines maladies psychiatriques qui peuvent altérer la capacité à conduire. Une visite médicale régulière, même simple, permettrait de repérer ces risques et d’éviter des drames.
Les modèles étrangers : des exemples à suivre ?
Plusieurs pays européens imposent un contrôle médical pour le renouvellement du permis. En Espagne, par exemple, les conducteurs doivent se soumettre à une visite médicale tous les 10 ans jusqu’à 65 ans, puis tous les 5 ans. En Italie, la fréquence augmente avec l’âge, avec un contrôle tous les 2 ans après 80 ans.
Ces dispositifs sont bien acceptés, car ils visent à préserver à la fois la liberté de conduire et la sécurité de tous. Le contrôle n’a pas pour but de retirer le permis à tout-va, mais plutôt d’adapter la conduite à la situation de chacun : limiter la conduite de nuit, interdire les autoroutes, ou imposer un véhicule automatique, par exemple.
Un équilibre entre prévention et stigmatisation
Imposer un contrôle médical régulier pour tous les conducteurs pourrait soulever des résistances : crainte de stigmatiser les personnes âgées, de pénaliser les zones rurales sans alternative à la voiture, ou d’alourdir les démarches administratives. Il faudra donc trouver un équilibre : rendre la visite médicale gratuite, légère, ciblée, et associer les médecins traitants au processus, plutôt que d’en faire une usine à gaz bureaucratique.
Le débat sur le contrôle médical obligatoire pour le permis de conduire n’oppose pas les jeunes aux vieux, ni la liberté à la sécurité. Il s’agit de prévenir les accidents évitables en s’assurant que chaque conducteur possède les aptitudes requises pour prendre le volant. À l’heure où la voiture reste indispensable pour beaucoup, mais où la vigilance sur la route n’a jamais été aussi cruciale, ce sujet mérite d’être pris au sérieux, sans dogmatisme, mais avec responsabilité.