Loin des clichés des marges indécentes qu’une concession automobile se ferait à la moindre vente d’un véhicule neuf (VN) ou d’occasion (VO), nous vous emmenons dans les coulisses de la distribution automobile, avec l’exemple du réseau Renault.
Secret bien gardé ou politique de rémunération méconnue du grand public, une concession automobile est loin de rouler sur l’or et est sans cesse sous tension. Descendez de votre nuage, puisque la rentabilité issue de la vente d’un VN ou VO ne se compte pas à coût de 10, 15 ou 20% de marge, mais en une poignée d’euros, et parfois moins, si ce n’est rien.
Des marges ridicules
Allons droit au but. Dans le réseau Renault, en fonction du modèle et de la finition, la marge nette dégagée par la vente d’un véhicule neuf oscille entre 400 et 600€, alors qu’au service occasion, cette dernière est légèrement supérieure avec une fourchette située entre 600 et 800€. Plus en détail, le constructeur récompense la vente d’un VN à hauteur de 300€, mais cette rémunération a été revue à la baisse ces dernières années. Attention, rappelez-vous d’une chose, une concession automobile ou un distributeur n’est pas le constructeur : il doit s’efforcer d’écouler des volumes, sans main mise (ou peu) sur le prix d’achat des véhicules et les volumes qu’on lui impose de acheter/vendre.
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Tais-toi et vends !
Globalement, les règles sont les mêmes pour tout le monde en France concernant le VN. Toutes les voitures de la gamme sont achetées au même prix. En théorie, si toutes les voitures achetées étaient vendues dans la minute, les marges seraient incroyables. Par exemple, dans le réseau Renault, une Nouvelle Clio 5 est achetée à la maison mère par la concession automobile avec une remise d’environ 9%.
Mais alors comment passe t-on de 9% de marge à 300 et 500€ ? Voyez-vous, au début de l’année, chaque directeur de réseau et/ou Responsable de la Distribution monte à Paris, au siège du Groupe Renault, pour s’engager sur des volumes de vente. Calculés en fonction des volumes antérieurs, de la taille du réseau ou encore des nouveautés à venir, les volumes retenus (et quasiment imposés) par Renault devront être écoulés par le distributeur, coûte que coûte. Les voitures seront quoiqu’il en soit produites, « alors démerdez-vous pour les vendre« . Voilà le message, avec les conséquences qui vont avec.
« Faussement » immatriculer ses véhicules pour survivre
Quel rapport avec la marge ? C’est simple, pratiquement aucun réseau n’arrive à boucler ses fins d’année. Ainsi, pour être « beau sur la photo », la plupart des réseaux disposent d’une boîte de location interne, qui servira uniquement à immatriculer tous les « invendus » pour que ces véhicules comptent comme « écoulés » dans le bilan final (les fameuses immatriculations tactiques !). Mais l’enjeu n’est pas tellement de se mettre Paris dans la poche, car une batterie de primes et de bonus sont à la clé, et la vraie marge d’une concession automobile ou d’un réseau se joue là. Sans rentrer dans le détail, vous allez avoir des primes sur les volumes vendus, le taux de véhicules financés, différents metrics liés à la qualité, etc.
Dans la pratique, on arrive dans un cercle vicieux où des véhicules immatriculés par ces fameuses boîtes de location pour obtenir tout ou une partie des primes deviennent assez vieux (+ de 180 jours…). Ils perdent, du coup, de leur valeur au fur et à mesure du temps, surtout dès lors qu’une nouvelle année débute. De plus, bien qu’avec 0 km, ces dernières sont juridiquement des occasions, vu qu’elles ont été immatriculées. Problème : étant donné qu’il faut que le réseau se « débarrasse » de ces véhicules avant qu’ils ne deviennent trop vieux, où qu’un nouveau véhicule soit commercialisé (coucou Renault Captur II !), il faut maintenant se battre sur deux fronts : écouler ses stocks de « vrais VN » pour faire les volumes promis, et écouler les stocks de VN dits « 0 km » pour éviter d’avoir des centaines de vieux véhicules sur les bras. Ainsi, une partie des VN deviennent à terme des VN 0 km et l’on rentre dans une routine dangereuse. Finalement, lorsqu’il s’agit de vendre un véhicule VN 0 km, l’objectif n’est plus de faire de la marge, mais simplement de limiter ses pertes… et de le vendre, à tout prix.
> Véhicules d’Occasion
La guerre du prix de reprise
En ce qui concerne le VO, leurs marges, légèrement supérieures, sont directement liées au prix de reprise du véhicule. Ainsi, si un vendeur VN a repris le véhicule de son client à un bon prix, cela bénéficiera à son collègue en charge du commerce VO. Et attention, si votre véhicule est racheté 2000 ou 3000€ sous sa valeur réelle, c’est pas pour le plaisir « de vous mettre une olive », mais parce que cette marge va être grignotée par des coûts de remise en état, nettoyage, préparation, prime vendeur… A la fin, et après le geste commercial que vous aurez obtenu auprès de votre conseiller commercial, la marge finale pour la concession automobile n’est pas si élevée.
Merci l’Europe !
Mais comme le VN, le service VO a plus d’un tour dans son sac. De plus en plus, avec la mutation du marché de la vente automobile qu’on abordera dans le paragraphe ci-dessous, les réseaux ont tendance à créer des cellules d’achat intra-communautaire (entre différents pays d’Europe, par exemple) pour augmenter leurs marges et ainsi rattraper les pertes du service VN. Résultat, pour obtenir des prix défiants toute concurrence, ces réseaux vont aller toquer à la porte d’un mandataire allemand, ou directement à Renault Italie, par exemple… Ainsi, en achetant des camions entiers, les prix vont chuter, et il sera assez fréquent de trouver une Fiat 500 ou une Audi A4 moins chère chez Renault que chez ces constructeurs (histoire vraie). C’est d’ailleurs comme cela que des mandataires type Starterre ou AramisAuto arrivent à proposer des niveaux de remise importants.
La recette est donc assez simple : acheter au prix italien, mais continuer à vendre au prix français. Résultat : les marges s’envolent par rapport au cycle VO classique avec une fourchette allant de 1500 à 2500€ par véhicule. « Malynx le lynx » !
> Après-Vente / Atelier
La rentabilité d’un atelier n’est pas réellement un secret d’Etat. Comme tous les garages, les bénéfices se font sur la main d’oeuvre et le prix des pièces. Toutefois, même si vous êtes un garage et que vous facturez comme des porcs, le chiffre d’affaires et la rentabilité n’arriveront jamais à compenser les pertes des deux services de vente. Ainsi, Si le VN ou le VO a du plomb dans l’aile, l’après-vente à elle seule ne peut pas supporter les bilans négatifs. Certes, ces derniers sont également soumis à des contrôles qualités menant à des primes non-négligeables, mais elles restent dérisoires face à celles des services VN et VO.
Une conjoncture qui n’aide pas
Là encore, nous pourrions écrire des romans. Entre les nouvelles normes WLTP qui freinent les ventes de véhicules et qui imposent aux constructeurs d’investir pour se mettre à niveau rapidement (= répercussions commerciales sur les objectifs des réseaux), ou bien la transition écologique qui pousse les français à acheter de l’hybride ou électrique, le marché se complexifie. Non pas pour des questions « produit », puisque l’offre existe chez la majeure partie des constructeurs leaders (Renault Zoé, Peugeot e-208, Nissan Leaf, Citroën C-Zéro, DS 3 Crossback E-Tense, Volkswagen e-Up, etc.), mais parce que les consommateurs ne sont pas encore prêts à passer à l’électrique pour divers raisons : coûts, infrastructures de recharge en France, « angoisse de la panne », etc.
L'avis de Downshift
Vous voilà aux faits des coulisses d’une concession automobile. A retenir : pour un véhicule neuf, gagnez du temps et demandez le stock « VN 0 km », et pour le VO, réclamez des « véhicules d’origine intra-com » et négociez votre coup de cœur, sinon rendez-vous chez le mandataire le plus prêt de chez vous…
Bonjour,je prévois d’acheter un Dester série limitée à 500 exemplaires de 2019 (modèle exposition)avec 1500 km.ce véhicule été vendu sur internet 19490€ le garage l’affiche à 19990€ Puis-je demandé le prix internet. Merci de bien vouloir me conseiller, merci.
Une voiture d’occasion peut être vendue plus chère que son prix catalogue, rien ne l’interdit. Dans votre cas, le malus a été payé par le concessionnaire, donc il se retrouve dans le prix de vente. Aussi, la voiture à peut être reçu des accessoires, c’est courant de le faire afin de respecter les objectifs accessoires imposés par le constructeur (en plus de tout le reste)
Bref, c’est normal.
Lien de reponse
Ainsi une concession Dacia a pu me vendre au prix catalogue une sandero 3 neuve, a majoré maintenant sa LDD de 94 a 145 euros sur une spring confort +
Résultat : je ne l’achèterai pas en deuxième voiture.
La raison ? Un commercial Renault a pleurniché sur la concurrence déloyale de Dacia je suppose. Quand il sera au chômage il pleurera encore plus.
En 3 ans l’environnement Renault a complètement changé, en cause: un nouveau patron, le covid, les semis-conducteurs et l’électrique.
DEMEO abandonne la politique des volumes et impose une politique de valeur, exit donc les immats tactiques et les tensions en fin de mois entre la DCF et le Réseau.
le Covid a fait beaucoup de dégâts: il faut un gros article rien que sur ce thème.
Les semis conducteurs: les stocks sont vides, les véhicules se font rare, cela a généré une énorme tension sur le VO qui fait grimper les prix comme jamais. D’ailleurs le R1 s’est gavé et se gave encore. et d’ailleurs, les évaluations de reprises faite depuis 2017-2018 font gagner un pognon de dingue au Réseau. Les estimations étant faite à l’époque sur des données de marché dite normal s’avèrent être très en deçà du marché actuel, et c’est donc à la faveur du Réseau qui peut vendre les VO en fin de loc avec des marges très confortables.
L’électrique: renault est plutôt en avance avec la ZOE mais le virage est quand même assez serré, le constructeur devait donc abandonner complètement le thermique et se lancer cœur et âme sur l’électrique, le HeV et le PHeV. à voir d’ici 2030 si cela paie.